BASSES PRESSIONS, DÉPRESSIONS !!!
La lycéenne que j'étais ( oh, il y a longtemps!!!) et l'étudiante en histoire-géographie ensuite, avait une réaction, face au mot dépression, bien différente que celle de la femme d'un certain âge(sinon d'un âge certain) que je suis devenue...Le temps passe et tout change.
Une dépression, c'était, auparavant, pour moi, un ensemble de basses pressions, inférieures à 1015 millibars (ou hectopascal, nous précisaient les professeurs attachés à la pureté du langage qu'ils voulaient nous voir employer). De "jolies" cartes nous indiquaient par une belle ligne rouge aux courbes voluptueuses, la frontière entre les basses pressions et les hautes pressions.
Pour faire simple et surtout, pour nous, les veilles de week-end ou de sorties, basses pressions signifiaient mauvais temps, pluies, parfois vent, en France comme au Maroc où j'ai longtemps vécu. Bref, pas la joie !!!
A présent, une dépression, c'est différent, mais ce n'est guère mieux pour moi.
Il existe toujours certes le phénomène météorologique qui, ici, peut se transformer en cyclones, ouragans et pires cataclysmes.
Je vais certainement paraître à beaucoup comme une égocentrique, incapable d'apprécier ma chance, ma vie tranquille... bref ,comme on me l'a déjà dit,
"une bourgeoise qui s'ennuie et qui s'occupe en regardant son nombril et en se lamentant."
Faux, et je répète fermement "Non, archi-faux". Beaucoup parlent sans ne rien connaître et, pire encore, en croyant savoir!
Je connais ma chance. J'essaie de m'intéresser aux autres, autant que possible, sans me prendre pour Soeur Emmanuelle ou Mère Thérésa. Je suis encore capable d'objectivité et d'humilité! J'ai envie de répondre à ceux qui m'adressent ces reproches qu'ils feraient bien de commencer par analyser leur propre attitude...Mais, là n'est pas le propos.
Je voudrais juste essayer de faire comprendre que la dépression, tout comme les basses pressions, est quelque chose de réel. Cela ne se voit pas comme une jambe cassée, ne se ressent pas comme une migraine( je connais, j'en ai !). Cela n'est souvent pas considéré par beaucoup comme une vraie maladie, vous savez, juste les humeurs (hormonales, peut-être?) de ces dames, la plupart du temps. Ces mêmes tartuffes savent -ils que la "Mélancolie" est une maladie extrêmement grave qui mène souvent au suicide? (cas connu de cet ambassadeur de France en Italie parti sans raison apparente dans les rues de Rome où il s'est donné la mort).
Avez-vous eu déjà un enfant un peu malade, patraque, sans qu'on sache exactement ce qu'il a? La réponse, en général, est une des suivantes : un virus, une allergie, le stress.
Pour une femme, c'est en général "psychosomatique et normal parce que les femmes actuelles sont toutes stressées avec la vie qu'elles mènent"(ça, c'est vrai...Enfin, une reconnaissance sociale!! )
A partir de là, un petit tranquillisant( je ne donne pas de nom...), un anti-dépresseur (il y a pléthore et mieux vaut ne pas en lire les éventuelles conséquences...), du yoga (très à la mode), du calme, moins de soucis ( on aimerait bien!) .
Et le tour est joué. On peut y rajouter quelques séances chez un psy (-chiatre si c'est un peu plus grave et -chologue si ça l'est moins).
J'en sais quelque chose. J'en ai parcouru le "chemin de croix"!
J'ai été soignée pendant des années pour stress, accompagné de migraines et d'une immense fatigue (normal, me disait-on, pour un prof de banlieue parisienne, de surcroît mère de 3 enfants) par ce type de thérapie. Je ne prétends rien, je ne porte pas de jugement, je relate des faits, je ne suis pas médecin. Le psy m'a trouvé quelques "trucs"...On traîne tous des casseroles, le centre anti-migraineux m'a asséné que c'était une "migraine vraie". Merci!( heureusement,il y a maintenant des médicaments anti-migraineux efficaces)
Et vogue la galère...
J'ai continué le yoga ( cela faisait très longtemps que je le pratiquais), pris des médicaments (changés de temps en temps parce que ça ne fonctionnait pas bien), fait de la natation, de la marche, du sport, et même des essais de "méditation zen" (là, j'ai eu du mal)... Cela a duré, duré, jusqu'à ce qu'un jour, par hasard, (lors d'une croisière sur le Nil, c'est inattendu...On pense plutôt trouver des temples, des colonnes, des momies et des pyramides..) je fasse la connaissance d'un médecin libanais qui, après une question que je lui posai sur un résultat d'analyse que je venais d'avoir, a diagnostiqué une "maladie orpheline" liée à l'existence, pour moi, (c'est différent chez d'autres patients) de petites tumeurs sur l'hypophyse, donc dans le cerveau ...
En effet tout était bien dans la tête!!! Mais pas à l'endroit prévu...
Je passe sur les hospitalisations, l'opération et tout ce qui accompagne ce type de maladie.
Comme me l'a dit un charmant médecin expert de l'Education Nationale, avec un tact digne des meilleurs "Vous avez de la chance d'être encore vivante"...De quoi vais-je donc me plaindre? Et la qualité de vie, Monsieur?
J'ai connu d'excellents médecins à l'hôpital, compétents et humains...Il y en a, heureusement...
Le professeur que je qualifierai d'extraordinaire autant par ses diagnostiques et soins médicaux que par ses qualités humaines et qui me suit depuis quelques années m'a avertie avec une délicatesse dont je lui suis reconnaissante (comme pour bien d'autres choses), que cette maladie provoquait, avant et surtout après l'intervention et les soins, des états dépressifs graves qu'on avait du mal à juguler.
Et voilà,je mets au moins un nom sur l'origine de mon "état dépressif" qui énerve tant mon entourage.
J'ai trouvé en Rque Dominicaine des psychiatres, en particulier un neurologue, qui a jugé que la dépression (j'allais dire "ma" dépression, mais loin de moi l'idée de me l'approprier) dont je souffrais était une vraie maladie. J'ai (et il a )beaucoup de mal à trouver le bon rythme de soins et de médicaments.
Je confirme qu'il y a des conséquences physiques importantes et gênantes dans la vie quotidienne tant pour soi que pour les autres.
Non, on ne fait pas la tête, non, on ne le fait pas exprès,
oui, on fait des efforts, oui, on fait tout pour se prendre en charge et vivre comme les autres, oui, on aimerait pouvoir sourire et rire.
Assez des... 'y a qu'à faut qu'on".
Les malades, car ce sont des malades au même titre que les autres, font ce qu'ils peuvent. C'est une maladie un peu particulière, mais c'est une maladie. On est aidé médicalement (heureusement) mais on a beaucoup de recherches "thérapeutiques" à faire seul. On devient vite insupportable pour les autres qui ne comprennent pas nos difficultés et mettent en doute notre volonté(bonne ou mauvaise!!!)
Oui, je le sais, il y a des gens qui meurent de faim, de maladies,qui ont des difficultés de survie. Il y a des gens au chômage, qui peinent dans des bidonvilles( combien de ceux qui critiquent en ont vu?), des enfants qui travaillent dans des conditions infâmes, des femmes qui sont maltraitées. J'en suis consciente. Je ne crois pas pouvoir être accusée d'égoïsme, tant envers les humains que les animaux.On me fait souvent le reproche d'être trop gentille, un peu poire pour ne pas dire plus...Trop bonne.....
La dépression est une maladie qui fait souffrir,face à laquelle le malade est souvent seul.
Je ne demande pas qu'on me plaigne, qu'on nous plaigne...Loin de moi cette idée.
Je demande sinon compréhension et aide, impossibles de la part de beaucoup, simplement qu'on nous prenne un peu au sérieux et qu'on cesse de nous regarder comme le clown triste de service.
Savez-vous qu'on meurt de la dépression, comme de toutes les autres maladies graves...Une simple constatation....